Ali ferma doucement la porte d’entrée. Il pénétra dans la cuisine où se trouvait déjà Faiza. Elle détachait son foulard, et lâchait sa longue chevelure brillante et odorante. Ali regardait sa femme d’un œil distrait. Faiza ne prit pas la peine de lui adresser une parole. Elle attrapa deux tasses de thé et les remplit d’un mouvement travaillé. « Hakim et Hassan ne sont pas encore rentrés ? » lança Ali à Faiza. Sans lever la tête elle lui répondit d’un ton sec « Ils sont dans leur chambre. » Elle avait le regard noir, la bouche retroussée et les poings accrochés à ses hanches. Faiza déplorait, non seulement le fait que son mari se détourne d’elle, mais qu’au delà de cela il délaisse ses propres enfants. Ceux qu’il avait tant désiré après plusieurs essais compliqués qui avaient valus d’éloigner significativement les époux.
Ali s’écroula sur une chaise et mis la tête dans ses mains au bord de la table. Depuis plusieurs jours il était préoccupé. Préoccupé, car Emilie, sa maitresse rodait autour de chez lui. Celle-ci lui en voulait de lui avoir caché sa vie maritale et parentale. Ali se défendait d’avoir seulement voulu s’évader un temps, avançant que la vie conjugale et le rôle de père l’avaient plongé dans un long sommeil. Et, qu’ainsi, Emilie, jeune femme éveillée à la peau ébène et au regard de braise, secrétaire et célibataire aurait pu le réveiller et le ramener à la vie solitaire.
Ils avalèrent l’un et l’autre, une gorgée de thé en se regardant dans les yeux. Faiza baissa sa garde et renifla. Elle essuya la perle sous son œil droit d’un revers de manche. Ali tenta de caresser la main de sa femme, mais elle la retira directement. Sa montre affichait 17h30. Elle se leva, passa une main dans sa chevelure soyeuse et déroula son tapis bleu et doré. Elle s’agenouilla, et commença sa prière. Ali, admirait sa femme. Il ne priait plus depuis son égarement. Il n’osait pas cet affront, et ça, Faiza l’avait remarqué. Elle s’était promis de demander à Hakim et à Hassan de ne se vouer à personne tant que cette promesse et ce dévouement n’étaient pas intérieur et décidé de plein gré et de ne pas se marier avant l’heure. En effet, elle ne pouvait blâmer totalement Ali, qui avait été pris à parti par sa famille pour leur assurer une descendance. Elle ne ressentait pas de colère, mais une tristesse écrasante, qui avait ternie son teint et l’avait rendue silencieuse. D’ordinaire charmeuse et lumineuse, Faiza ne souriait plus. Elle attendait. Elle ne parlait plus non plus, une honte vicieuse s’était emparée d’elle. Considérant qu’elle n’avait pas assez comblé son mari, elle n’osa jamais se confier à qui que ce soit.